Un diagnostic précoce - la clé de voûte d’une prise en charge efficace et de la qualité de vie (QdV)

Au-delà de l’importance des examens complémentaires permettant de diagnostiquer la MRC, il est encore plus crucial de connaître les signes précoces de cette maladie. Le diagnostic précoce conditionne le pronostic et son impact va au-delà de la clinique vétérinaire, jusqu’au domicile des propriétaires, façonnant ainsi la trajectoire des soins de santé des chats. 

Les visites régulières chez le vétérinaire sont un élément fondamental, en particulier lorsque les chats vieillissent. Ces consultations permettent d’effectuer des examens cliniques et des dépistages complets, qui constituent la première ligne de défense contre l’apparition insidieuse d’une maladie rénale chronique (MRC). 

L’utilisation d’outils de diagnostic avancés et de biomarqueurs lors des examens de routine permet aux vétérinaires d’investiguer et d’identifier les marqueurs quasiment imperceptibles d’une atteinte rénale précoce. Cette approche proactive permet d’intervenir avant que les signes cliniques ne deviennent manifestes.

Reconnaître les signes courants de la MRC féline

Il est indispensable que les vétérinaires soient capables de reconnaître les signes cliniques qui indiquent un stade précoce de MRC. La polyurie, la polydipsie, la perte de poids et les modifications de la concentration urinaire sont des marqueurs diagnostiques essentiels. Une vigilance proactive lors des examens de routine favorise une détection précoce.


Analyses de sang : au-delà de l’urée et de la créatinine

Les tests sanguins mesurant l’urée et la créatinine permettent de connaître le taux de filtration glomérulaire. Des indicateurs tels que l’anémie, l’hypokaliémie et l’hyperphosphatémie contribuent également à établir un profil diagnostic complet, soulignant ainsi l’importance des visites vétérinaires régulières et des dépistages.

La SDMA : un biomarqueur sensible

La diméthylarginine symétrique (SDMA) est devenue un biomarqueur sensible qui facilite la détection précoce des dysfonctionnements rénaux. Son utilité dans l’identification de la maladie rénale aux stades précliniques souligne son importance dans les algorithmes de diagnostic. 

Il convient de surveiller de près les valeurs de créatinine supérieures à 1,6 mg/dl ou 140 µmol/L, car elles suggèrent une maladie rénale chronique. Si ces valeurs restent dans la plage normale, mais que d’autres anomalies sont détectées, telles qu’une SDMA >18 µg/dl (ou une SDMA constamment élevée > 14 µg/dl) ou d’autres anomalies cohérentes lors d’examens successifs, comme de faibles concentrations urinaires sans cause non rénale identifiable, une protéinurie d’origine rénale (RPCU > 0,4), une palpation rénale anormale ou une anomalie à l’imagerie rénale, il y a suffisamment d’indications pour envisager un diagnostic précoce de MRC

Examens urinaires : évaluation complète de la fonction rénale

L’analyse de la densité urinaire (DU) et de la protéinurie complète les tests sanguins, ce qui permet d’obtenir une évaluation complète de la fonction rénale. Des changements minimes, comme une diminution de la densité urinaire (DU < 1,035) ou une augmentation du rapport protéines sur créatinine urinaires (0,2-0,4 protéinurie limite ; > 0,4 protéinurie), peuvent servir d’indicateurs précoces, guidant la précision du diagnostic.

Surveillance de la pression artérielle

L’hypertension est une comorbidité fréquente lors de MRC. Une surveillance régulière de la pression artérielle permet une détection précoce, une prise en charge proactive et l’atténuation des complications potentielles. La fréquence de l’hypertension sévère augmente avec le stade IRIS. 

Il est essentiel de familiariser nos patients félins avec les conditions de mesure et d’effectuer plusieurs mesures, de préférence au cours de différentes visites et à des jours différents. Il est néanmoins acceptable de prendre des mesures au cours de la même visite à un intervalle minimum de 2 heures. La sous-catégorisation des patients est déterminée par leur pression artérielle systolique, en tenant compte du niveau de risque de lésions des organes cibles et de la présence de preuves indiquant de telles lésions. Les sous-stades de pression artérielle IRIS sont les suivants : 

  • < 140 Normotendu 
  • 140 - 159 Pré-hypertendu 
  • 160 - 179 Hypertendu 
  • > 180 Gravement hypertendu

Imagerie médicale : au-delà de la visualisation

Les différents examens d’imagerie, notamment les radiographies et les échographies jouent un rôle essentiel dans l’évaluation de la structure rénale. La détection des anomalies structurales et l’évaluation de l’intégrité parenchymateuse permettent d’éclairer les décisions thérapeutiques et le pronostic.

Biopsie rénale : une fenêtre sur l’histopathologie

Les biopsies rénales, bien qu’invasives, donnent des indications précieuses sur les changements histopathologiques. Les informations spécifiques issues des biopsies s’avèrent être particulièrement précieuses lorsqu’il s’agit d’envisager des options thérapeutiques avancées, telles que la greffe de reins. 

L’objectif de la biopsie rénale est d’obtenir des informations précieuses pour gérer plus efficacement les affections rénales, ce qui permet souvent de poser un diagnostic définitif. Grâce aux progrès réalisés dans la détection précoce de la maladie rénale chronique, cette technique est de plus en plus utilisée et permet de mieux comprendre la gravité, l’activité, la chronicité et la réversibilité potentielle des changements pathologiques. C’est sur la base de ces informations que sont prises les décisions cliniques concernant le pronostic et le traitement. 

Pour éviter toute complication, il est essentiel d’avoir stabilisé le chat au préalable et de maîtriser les techniques de biopsie disponibles, en utilisant l’équipement et les ressources nécessaires à leur exécution. Bien que l’approche la plus simple soit une biopsie échoguidée à l’aiguille du cortex rénal sous anesthésie générale, il est impératif d’adapter la technique à chaque patient examiné.

Stades de la maladie rénale chronique chez le chat

Il est fondamental pour les vétérinaires de comprendre les stades de la MRC afin d’adapter les interventions en fonction de la gravité de l’affection. L’International Renal Interest Society (IRIS) propose un système de stadification qui classe la MRC en quatre stades selon des critères spécifiques. Il est crucial de classer les patients par stade afin de leur offrir la prise en charge la plus appropriée au stade de leur maladie.

Pronostic - Interpréter les résultats des patients

Estimer le pronostic de la MRC est complexe. La détection précoce influence considérablement le pronostic. Une compréhension globale des variables individuelles du patient, telles que les comorbidités et la réponse aux interventions, permet d’estimer le pronostic. Il s’agit probablement de ce qui intéresse le plus le propriétaire, c’est pourquoi nous devons y porter une attention particulière . Nous devons établir un diagnostic et une stadification adéquats, afin de parvenir au pronostic le plus précis possible.

  • IRIS Board (2023) IRIS Staging of CKD. Available at http://iris-kidney.com/pdf/2_IRIS_Staging_of_CKD_2023.pdf (Accessed November 2023)
  • Hori Y, Heishima Y, Yamashita Y, Isayama N, Kanno N, Nakamura K, Iguchi M, Ibaragi T, Onodera H, Aramaki Y, Hirakawa A, Yamano S, Katagi M, Kitade A, Sawada T. Relationship between indirect blood pressure and various stages of chronic kidney disease in cats. J Vet Med Sci. 2018 Mar 24;80(3):447-452. doi: 10.1292/jvms.17-0620. Epub 2018 Jan 3. PMID: 29311521; PMCID: PMC5880824.
  • Payne JR, Brodbelt DC, Luis Fuentes V. Blood Pressure Measurements in 780 Apparently Healthy Cats. J Vet Intern Med. 2017 Jan;31(1):15-21. doi: 10.1111/jvim.14625. Epub 2016 Dec 1. PMID: 27906477; PMCID: PMC5259628.
  • Nephrology and Urology of Small Animals. Editor(s):Joe Bartges DVM, PhD, DACVIM (Small Animal Internal Medicine), DACVN,, David J. Polzin DVM, PhD, DACVIM (Small Animal Internal Medicine), First published:18 February 2011. Print ISBN:9780813817170 |Online ISBN:9781118785546 |DOI:10.1002/9781118785546

  • Bartges J., Polzin D.J. Chronic Kidney Disease. Nephrology and Urology of Small Animals. 1st ed. Wiley Blackwell; Oxford, UK: 2011. pp. 433–468. 

keyboard_arrow_up